Tout au long de ma scolarité, je me suis ennuyée. J’ai pu cerner ce qui me manquait pour m’épanouir en apprenant. J’ai pu observer des failles sans toutefois pouvoir imaginer clairement ce qui me conviendrait mieux. J’ai souffert de ce formatage permanent visant à nous conditionner afin que l’on pense un peu, mais pas trop quand même. Les dictées de droit constitutionnel ou les QCM de sciences politiques resteront gravés dans ma mémoire. Assise pendant 8 heure de temps à « gratter » en amphithéâtre, je me suis souvent demandée qui avait décidé de nous faire vivre cela. Pourquoi réunir pas moins de 500 jeunes cerveaux et des experts pour nous faire vivre quelque chose d’aussi ennuyant, d’aussi peu stimulant ?

J’avais partagé dans un précédent article ma vision sur l’éducation/ la formation. J’aimerais désormais évoquer quelques éléments qui font sens pour moi dans le processus d’apprentissage.

Quelques mets attrayants en Angleterre

J’ai eu la chance d’aller passer mon master 2 en Angleterre. Premier jour, première heure, un prof nous dit qu’on peut l’appeler par son prénom, qu’il va nous donner de la lecture pour la séance suivante et que cela sera une base de discussion. J’ai trouvé ça drôlement cool. On s’est retrouvés assis à son niveau, en cercle de chaises. Nous avons alors entamé une conversation passionnante sur un cas spécifique de droit international humanitaire. On avait le droit de penser. De penser vraiment. Pas juste de citer des auteurs « qui ont pensé que ». Et on avait même le loisir de s’exprimer. S’exprimer véritablement. Pas sur le mode thèse/ antithèse où alors je détruis l’argumentaire de l’autre pour prendre le dessus, comme on aime tant le faire en France (les fameux « débats » sociétaux). On avait l’occasion de s’écouter mutuellement pleinement. Le professeur, qui était une pointure dans le domaine, nous apportait des clés pour aller plus loin dans le raisonnement. Ses apports, son expérience étaient accueillis car il avait su nous engager en amont, éveillant ainsi notre curiosité, ouvrant de ce fait une réflexion. Ces professeurs qui savaient se mettre à notre niveau pour nous abreuver de leurs savoirs, tout étant donc accessibles, humains et humanisés, m’ont déjà beaucoup éclairée sur la possibilité d’une autre façon de faire.

Du cinq étoiles au Canada

C’est ensuite au Canada que j’ai découvert encore une autre façon d’enseigner qui m’a semblée tout à fait merveilleuse. Lorsque je me suis formée à l’Institut canadien pour la résolution des conflits, je n’imaginais pas que chaque semaine de formation allait être aussi puissante, riche d’enseignements multiples. Si je devais comparer ce que j’ai retenu de plusieurs années d’études en France versus quelques mois au Canada, j’aurais certainement envie de pleurer. Or aujourd’hui, j’ai plutôt envie de sourire tant cette expérience a été bouleversante et édifiante. C’est en expérimentant des choses qu’on retient le plus et grâce à cette formation, j’ai pu découvrir deux choses fondamentales. Une matière qui m’a passionnée à savoir la facilitation du dialogue, la médiation. Et également, une pédagogie bluffante. C’est grâce à cela que j’ai pu développer mes techniques de facilitation actuelles, si précieuses et stimulantes. J’aimerais vous partager plusieurs « ingrédients » que j’ai pu goûter et assimiler pour en faire aujourd’hui une base de recette donnant satisfaction. Quels sont donc ces ingrédients qui rendent une formation riche et efficace ?

Mijoter la confiance, créer du lien

Sans confiance au sein d’un groupe, il ne se passe pas grand-chose. Les choses restent en surface, les personnes gardent leurs boucliers. Vous n’iriez pas vous faire triturer les dents par un professionnel en qui vous n’avez pas confiance. Un bébé n’apprendra pas à marcher s’il n’est pas sécure. Prendre un temps pour générer de la confiance ouvre quelque chose au niveau de l’esprit et du cœur. Je reçois et je donne si je suis en confiance. La confiance passe aussi par le fait de poser un cadre. Par exemple, co-construire quelques règles de fonctionnement pour la formation aide les participants à se sentir en sécurité. Qu’ils se sentent libres de faire ce dont ils ont besoin pour être attentifs (écouter tout en étant debout par exemple).

De plus, créer du lien entre les participants est essentiel. Même pour une seule journée de formation. Cette cohésion fait naitre et/ou renforce l’envie de partager avec autrui. Et ce sont ces partages multiples autour des expériences de vie, des perceptions, des façons de faire, qui rendent les formations si riches. J’ai eu parfois des participants qui au bout d’une journée de formation étaient agréablement surpris de finalement découvrir leurs collègues.

Mettre une bonne dose de jeux et d’expérimentations

Un collègue formateur m’a dit il y a peu : « Tu fais beaucoup jouer tes participants, c’est marrant, je n’avais jamais vu ça ! ». Observons les enfants. Leur merveilleuse capacité d’apprentissage tout en jouant! Pourquoi aurions-nous perdu cela ? Et si cela sommeillait et ne demandait qu’à être réveillé ? Qui a dit qu’apprendre était forcément chiant ? Je ne propose pas des jeux simplement pour le plaisir de jouer. Je propose des dynamiques qui prennent différentes formes et qui répondent à différents objectifs selon le moment. Energiser le groupe ou alors le poser, générer des interactions et de l’ouverture, inviter au mouvement, nourrir la réflexion. Je suis maintenant persuadée qu’un concept théorique sans une expérimentation en amont ou après ne sera pas assimilé. Je réfléchis donc pour chaque concept ou chaque outil à une expérimentation à faire vivre au groupe.

« Donner le goût de », impliquer les participants

Un collègue formateur m’a dit il y a peu : « Tu fais beaucoup jouer tes participants, c’est marrant, je n’avais jamais vu ça ! ». Observons les enfants. Leur merveilleuse capacité d’apprentissage tout en jouant! Pourquoi aurions-nous perdu cela ? Et si cela sommeillait et ne demandait qu’à être réveillé ? Qui a dit qu’apprendre était forcément chiant ? Je ne propose pas des jeux simplement pour le plaisir de jouer. Je propose des dynamiques qui prennent différentes formes et qui répondent à différents objectifs selon le moment. Energiser le groupe ou alors le poser, générer des interactions et de l’ouverture, inviter au mouvement, nourrir la réflexion. Je suis maintenant persuadée qu’un concept théorique sans une expérimentation en amont ou après ne sera pas assimilé. Je réfléchis donc pour chaque concept ou chaque outil à une expérimentation à faire vivre au groupe.

Accommoder le tout en plaçant l’apprenant au cœur du processus

Il n’existe pas deux cerveaux identiques. Être devant un groupe c’est capter une pluralité de sensibilités, de perceptions, de façons d’être, de façons de faire, d’aspirations, de besoins et d’attentes innombrables. En tant qu’apprenante, j’adore les jeux de rôles par exemple. Cependant, j’ai conscience que ce n’est peut-être pas le cas de tous. Varier les supports pédagogiques, proposer des temps de formation très différents aide à capter l’attention de tous. Un moment de réflexion avec un support visuel ; un exercice en binôme; une dynamique collective; un exercice d’introspection, un support vidéo; un travail à faire en sous-groupes. Aller à l’extérieur si possible. Utiliser différents espaces. Apporter de la considération à toutes les personnalités, tenter de répondre au mieux au besoin de chacun. Plus le facilitateur est à l’écoute pour proposer et adapter diverses méthodes selon son groupe, plus il multiple ses chances de toucher tous les types d’apprenants.

Alors bien sûr cette recette n’est pas exhaustive mais je constate qu’avec une telle préparation de base, les résultats sont souvent très positifs. En tous cas – et pour reprendre une formule canadienne que j’apprécie – j’ai toujours le goût de donner des formations avec ces ingrédients et cela me nourrit profondément!